Le licenciement économique en visioconférence est impossible
Licencier 900 personnes d’un coup, soit quasiment 10 % de l’effectif de la société américaine ne pourrait se transposer en France. En effet, le licenciement pour motif économique collectif impose une procédure longue.
En fonction de l’effectif global de l’entreprise, plusieurs instances représentatives doivent être informées en amont tel le Comité social et économique (CSE) avec des réunions séparées d’un délai de 14 jours.
Pour les entreprises de plus de 50 salariés, un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) sera mis en place. Les consultations et transmissions au CSE et à la DREETS (Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités) via le portail RUPCO (ruptures collectives de contrats de travail) allongent les délais.
En conclusion, en France, à ce jour, un employeur ne peut pas licencier 200 personnes avec effet immédiat en les informant du licenciement sur Zoom ou sur une autre plateforme de visioconférence. D’ailleurs, aux États-Unis, le licenciement par emailing ou par un envoi massif de courriers aux salariés est envisageable. Seuls les moyens de communication évoluent…
Le licenciement individuel en visioconférence est possible
Le droit du travail français impose une protection des salariés lors du licenciement. Toutefois, il n’impose pas une rencontre physique lors de l’entretien préalable. En effet, l’article L 1232-2 du Code du travail prévoit que la convocation à un entretien préalable au licenciement. Cette convocation est adressée par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise en main propre contre signature, au minimum 5 jours avant la tenue de cet entretien.
Si le formalisme est important sur l’envoi de la convocation, rien n’est dit sur les modalités de l’entretien. Dans la partie réglementaire du Code du travail, seul le lieu de l’entretien doit être mentionné dans les documents.
Les tribunaux s’attachent au respect des droits du salarié licencié, plus qu’aux modalités :
- acceptation de l’entretien par le salarié,
- possibilité de s’exprimer sur les motifs du licenciement,
- possibilité de se faire assister par la personne de son choix.
Distinguons la période pré-Covid et la période post-Covid. En effet, les tribunaux saisis de de dossiers de licenciement avaient tendance à refuser la tenue des entretiens préalables à distance dès lors que le salarié s’y opposait. Par exemple, les cours d’appel de Bordeaux en 2017 et de Grenoble en 2020 avaient statué en ce sens. D’autres tribunaux ne s’opposaient pas à la tenue de l’entretien préalable en visio comme la cour d’appel de Rennes en 2016. En l’absence de décision de la Cour de cassation, une certaine incertitude demeure.
Le licenciement en visioconférence depuis la pandémie ?
Depuis la pandémie, les outils de visioconférence ont intégré le monde du travail. Après les confinements, on peut penser qu’un entretien préalable au licenciement pourrait se dérouler sur Zoom, sur Meet ou sur n’importe quel autre outil de visioconférence. Le développement du télétravail ou du travail hybride permet désormais d’embaucher des salariés à l’autre bout de la France, voire du monde.
Le droit du travail s’adaptera certainement à ces nouvelles situations. Nous attendons impatiemment un éclaircissement de la Cour de cassation ou du législateur au sujet du licenciement par visioconférence. La Direction générale du travail avait admis le recours à la visioconférence pendant la période du premier confinement dans des conditions restrictives.
Dans tous les cas, cela impose de respecter les droits du salarié licencié. Récemment la cour d’appel de Versailles a décidé le 4 juin 2020 (à la sortie du premier confinement) que le principe était la tenue d’un entretien préalable au licenciement en présentiel. Toutefois, dans les circonstances particulières au moment des faits, l’employeur pouvait recourir à un entretien préalable au licenciement en téléconférence.
En l’espèce, le licenciement concernait un salarié basé à Dubaï en 2016 tandis que l’employeur résidait en région parisienne. La cour d’appel de Versailles à tenu à vérifier que les droits du salarié licencié étaient respectés : elle mentionne que l’appel a duré plus d’une heure, que la personne représentant le salarié avait pu pleinement s’exprimer et que le salarié n’avait pas souhaité le faire.
Notre Cabinet d’avocats pour toute question relative au licenciement, à l’entretien préalable et aux relations conflictuelles de votre entreprise.