Comprendre le licenciement pour inaptitude
Définition du licenciement pour inaptitude
Qu’est-ce que l’inaptitude au travail ?
Devenir inapte peut résulter d’une maladie ou d’un accident. Après un arrêt maladie conséquent, le médecin du travail est le seul habilité à reconnaître l’inaptitude du salarié à reprendre son poste.
Ainsi, votre médecin traitant ou un médecin spécialiste ne peut pas vous déclarer apte ou inapte !
L’inaptitude médicale d’un salarié est différent d’un avis sur des compétences, d’un arrêt de travail et d’une invalidité.
Quels sont les différents types d’inaptitude ?
Il existe deux types d’inaptitude :
- l’inaptitude d’origine non professionnelle en raison d’une maladie ou d’un accident personnel ;
- l’ianptitude d’origine professionnelle en raison d’une maladie professionnelle ou d’un accident de travail.
Dans tous les cas, une maladie grave ou un accident peut impliquer un changement de vie pour le salarié. Le médecin s’intéresse aussi bien à votre état de santé physique qu’à votre santé mentale !
L’employeur doit contacter la médecine du travail pour organiser une visite de reprise en cas d’arrêt supérieur à 60 jours (sans délai pour une maladie professionnelle).
Quelle est la procédure d’inaptitude ?
Le rôle du médecin du travail
Une procédure spécifique est obligatoire (article R 4624-32 du Code du travail) :
- le médecin du travail réalise un examen médical et peut demander des examens complémentaires ;
- il s’intéresse aux modalités d’exercice de votre emploi (nature des missions, risques, conditions d’exercice, etc.) ;
- il effectue un tour d’horizon des conditions dans l’entreprise, notamment en vérifiant la date de mise à jour de la fiche d’entreprise, qui répertorie les risques professionnels et les salariés qui y sont soumis ;
- il échange avec l’employeur pour évoquer un éventuel changement de poste.
Le médecin peut alors vous déclarer inapte à votre poste. En particulier si votre état de santé ne permet pas de reprendre votre poste et justifie un changement de poste.
Il doit constater l’impossibilité d’aménager votre poste actuel. Dans son avis, il peut également indiquer votre capacité à suivre une formation pour occuper un nouvel emploi dans l’entreprise.
Contester l’avis d’inaptitude
Le médecin du travail rédige alors un avis d’inaptitude qu’il transmet à l’employeur et à l’employé.
Chacun peut contester devant le conseil des prud’hommes cet avis d’inaptitude dans les 15 jours. Les juges mettent alors en place une procédure accélérée au fond, jugée devant la formation de référé.
Lors d’une première audience, les juges peuvent ordonner une procédure d’instruction (consultations, expertises médicales, etc.). Puis, lors d’une seconde audience, les juges rendent une décision qui se substitue à l’avis médical initial.
Attention, le secret médical empêche la transmission du dossier médical créé par le médecin au conseil des prud’hommes. Seul un expert mandaté par eux peut y accéder avec l’accord du salarié.
Quelles sont les obligations de l’employeur en cas d’inaptitude ?
L’employeur a une obligation de reclassement du salarié inapte sauf dans deux cas :
- si le médecin déclare que le maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable pour votre santé ;
- ou s’il estime que votre état de santé vous rend inapte à toute activité professionnelle.
En dehors de ces situations, l’employeur doit proposer au salarié un autre emploi, en phase avec ses capacités et son état de santé.
L’entreprise consulte le CSE (comité social et économique) s’il en existe un. Le poste proposé doit être le plus proche possible des fonctions exercées avant l’accident ou la maladie. Le reclassement ne peut servir de prétexte pour le licenciement ! L’entreprise peut proposer un poste dans une autre filiale française du groupe.
En outre, l’employeur doit procéder aux aménagements et adaptations nécessaires.
Attention, la loi ne prévoit aucun délai précis pour proposer un reclassement ! L’employeur n’a pas à vous rémunérer le premier mois sauf dispositions conventionnelles plus favorables. Passé ce délai d’un mois, il vous paie votre salaire jusqu’à ce qu’une solution soit trouvée (reclassement dans un autre poste ou licenciement).
Le salarié a le droit de refuser le poste de reclassement proposé. L’employeur peut aussi expliquer par écrit les raisons pour lesquelles aucun reclassement n’est envisageable.
Procédure de licenciement pour inaptitude
Les motifs de licenciement pour inaptitude
Le licenciement pour inaptitude conduit à la rupture du contrat de travail dans 4 cas :
- le salarié refuse le poste proposé au terme du reclassement ;
- l’employeur ne peut pas vous trouver un poste adapté ;
- l’avis d’inaptitude déclare que tout maintien dans un emploi serait préjudiciable pour votre santé ;
- cet avis mentionne que votre état physique ou mental rend impossible tout reclassement.
Les étapes de la procédure de licenciement
Comme le précise l’article L 1226-2-1 du Code du travail, la procédure de licenciement pour inaptitude suit celle du licenciement pour motif personnel.
Avant de licencier son salarié, l’employeur doit donc le convoquer à un entretien préalable au licenciement. La convocation nécessite un délai de 5 jours ouvrables au minimum entre la date de l’entretien et la date de première présentation du courrier recommandé ou de la remise en mains propres.
L’absence du salarié à cet entretien préalable ne peut lui être reproché.
Ensuite, plus de 2 jours ouvrables après, l’employeur adresse une lettre de licenciement, qui comporte le motif de licenciement. Pour un licenciement pour inaptitude, il doit préciser non seulement l’inaptitude mais aussi le refus du salarié, l’impossibilité de reclassement ou les dispenses de reclassement indiqués dans l’avis d’inaptitude du médecin.
Le contrat de travail prend fin à compter de la notification de la lettre de licenciement. En cas d’inaptitude, le salarié est dispensé d’effectuer son préavis.
Contester un licenciement pour inaptitude
Quel délai pour contester un licenciement pour inaptitude ?
Comme toute procédure de licenciement, le délai pour saisir le conseil des prud’hommes en contestation d’un licenciement est de 12 mois. Le délai part à compter de la notification de le lettre de licenciement.
Recours devant le conseil de prud’hommes
Votre contestation peut porter sur un défaut dans la procédure de licenciement (licenciement irrégulier). Ce sera alors lié au non-respect des délais ou du contenu de la convocation à l’entretien préalable ou de la lettre de licenciement.
La contestation peut aussi porter sur l’absence de reclassement de l’employeur ou sur le fondement même de votre inaptitude. Attention, nous avons vu que le délai pour contester l’avis d’inaptitude est bien plus court : 15 jours seulement. Les propositions de reclassement doivent être réelles et adaptées, faute de quoi le licenciement pour inaptitude pourra être reconnu sans cause réelle et sérieuse.
Il est aussi possible de prouver que le licenciement pour inaptitude est lié aux manquements de l’employeur à ses obligations de santé / sécurité pour vous permettre d’obtenir votre licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Nos conseils pour préparer votre dossier aux prud’hommes
Prenez contact avec un avocat en droit du travail rapidement, alors même que vous êtes encore en arrêt maladie. Cela permet de faire le point sur votre dossier, les perspectives de reclassement et les différentes possibilités (notamment de sortie négociée).
Le salarié doit conserver tous les échanges et documents avec les médecins, l’employeur, le CSE, etc. Préparez un dossier complet avec les dates de vos arrêts maladie par exemple, les avis de réception des recommandés, les offres d’emploi en circulation dans l’entreprise qui peuvent vous correspondre, etc.
Une première consultation en amont vous donne les clés pour obtenir les informations pertinentes au bon moment. C’est essentiel lorsque l’on porte un litige devant les prud’hommes.
Dès la réception de l’avis d’inaptitude, discutez avec l’un de nos avocats de la possibilité de le contester dans les 15 jours. Tout doit alors aller très vite.
Protection et droits des salariés
Les indemnités de licenciement pour inaptitude
Le salarié perçoit les indemnités légales de licenciement pour motif personnel. Les accords collectifs en vigueur dans l’entreprise peuvent se montrer plus généreux que les règles légales. L’indemnité est égale à :
- 1/4 de mois de salaire brut par année d’ancienneté jusqu’à 10 ans ;
- 1/3 de mois de salaire brut par année d’ancienneté après 10 ans.
Puis, il reçoit les indemnités compensatrice de congés payés.
En revanche, il ne perçoit pas l’indemnité de préavis, qu’il ne peut effectuer, sauf convention collective plus favorable.
Vérifiez également que l’employeur verse bien tous les reliquats de rémunération et de primes diverses (proratisées le cas échéant, en fonction de la durée effectuée). Enfin, il a droit à l’intéressemnet et à la participation selon les modalités en vigueur dans l’entreprise.
Si l’origine de l’inaptitude est professionnelle, le salarié doit recevoir une indemnité équivalente à l’indemnité compensatrice de préavis, même s’il ne l’effectue pas. Il reçoit aussi une indemnité spéciale de licenciement égale au double de l’indemnité légale.
Les allocations de retour à l’emploi
Le salarié licencié pour inaptitude pourra s’inscrire à Pôle Emploi s’il n’est pas en âge de partir en retraite.
Les mesures de prévention et de sécurité de l’employeur
Rappelons ici le rôle crucial de l’employeur en matière de prévention et de sécurité dans l’entreprise. Il a en effet une obligation de résultat dans la prévention de l’inaptitude.
Rôle de l’employeur dans la prévention de l’inaptitude
Droits du salarié face à une situation de danger
Ressources et Assistance
Guides et articles thématiques
Actualité sur le licenciement pour inaptitude
Suivre l’actualité juridique est essentiel. Par exemple, le ministre de l’Économie et des Finances a récemment fait part de son souhait de modifier le délai légal pour contester un licenciement. Ainsi, de 12 mois, il souhaiterait faire passer le délai pour agir devant les prud’hommes à 2 mois ! Une actualité à suivre…
Jurisprudence sur la contestation d’un licenciement pour inaptitude
La Cour de cassation a rendu une décision intéressante, le 19 avril 2023. Un salarié est licencié pour inaptitude. Des faits de harcèlement moral sont reconnus à l’origine de l’inaptitude du salarié. Les juges prononcent donc la nullité du licenciement. Toutefois, cela ne fait pas obstacle à la possibilité de réintégration du salarié. Par ailleurs, la Cour de cassation considère l’impossibilité de réintégration devait être caractérisée par une inaptitude au moment où la cour d’appel a statué.
Dans une autre affaire du 6 juillet 2022, la Cour de cassation a validé la nullité d’un licenciement pour inaptitude dès lors que l’employeur a commis une faute. En l’espèce, il avait manqué à son obligation de sécurité, qui avait favorisé un harcèlement moral conduisant à l’inaptitude. L’employeur n’avait pas réagi à la dénonciation de ce que le salarié percevait être du harcèlement moral…
Assistance et conseil juridique
L’accompagnement par un avocat spécialiste en droit du travail vous permettra de contester votre licenciement pour inaptitude de plusieurs façons.
Tout d’abord, votre avocat pourra chercher à démontrer que l’employeur n’a pas suivi les préconisations du médecin ou s’est montré négligent face à son obligation de reclassement.
En outre, l’avocat en droit du travail peut contester les indemnités de licenciement. En reprenant leur calcul complexe, il peut chercher la faille.
Vous souhaitez contester une mesure de licenciement pour inaptitude ? Les avocats du travail du cabinet Howard vous guident.